Chaloupe

Nos questions sur les compteurs Linky

 

A ce jour, plus de 10 millions de compteurs Linky ont été installés par Enedis, filiale à 100 % d'EDF qui gère pour le compte des collectivités locales la quasi totalité du réseau de distribution de l’électricité. Sur les 35 500 communes, seules 600 ont pris des arrêtés anti-Linky. Voici un premier état des lieux des questions qui se posent encore.

1- Le coût du compteur Linky
Le 7 février dernier, la Cour des comptes contestait ce projet coûteux pour le consommateur évalué à 5,7 milliards € (alors que les compteurs remplacés fonctionnent sans problème).

La CLCV estime anormal que le consommateur ne sache toujours pas quel en sera le coût sur sa facture d’électricité. Enedis sur cette question fait le mort et n’a pas pas répondu à notre demande. La position de GRDF est bien plus transparente puisqu’elle annonce que le compteur Gazpar, qui se met en place avec une technologie tout à fait différente de radio-transmission, coûtera de 2 à 3 € par an pour chaque consommateur.

2- La question des ondes
Alors que les compteurs Linky ont été déployés à partir de 2015 (mais expérimentés en 2010 et 2011), il a fallu attendre 2016 (mesures de l’Agence nationale des hautes fréquences ou ANFR) et 2017 (mesures de l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail ou ANSES) pour avoir confirmation que les champs électriques ou magnétiques émis par le compteur Linky sont à l’origine d’une exposition comparable à celle d’autres équipements électriques déjà utilisés (télévision, chargeur d’ordinateur portable, table de cuisson à induction, téléphone portable...), et dans tous les cas inférieure aux valeurs réglementaires françaises :

  - de 0,08 à 3,9 v/m pour le champ électrique, soit 22 fois moins que la valeur limite (87 v/m).

  - 0,26 µT pour le champ électromagnétique, soit 24 fois moins que la valeur limite (6,25 µT).

Notons que les compteurs Linky communiquent avec les concentrateurs extérieurs par fil en utilisant la technologie CPL, c’est-à-dire en superposant au courant alternatif de 50 Hz des câbles électriques, un signal basse fréquence de 3 à 148 kHz . Les émissions d’ondes ne sont donc absolument pas comparables aux émissions haute fréquence de la Wifi ou des téléphones portables.

La CLCV regrette cette absence de transparence et de réactivité d'Enedis, alors que de nombreux citoyens et associations (dont la CLCV) s’interrogent avec raison sur cette question majeure. Si Enedis avait bien informé les usagers en temps et en heure en s'appuyant sur des études officielles et indépendantes, nous ne connaîtrions sans doute pas les craintes ou les inquiétudes actuelles.
Si à ce stade, rien ne prouve que les compteurs Linky posent des problèmes sanitaires, la CLCV considère qu’il faut néanmoins rester prudent parce que le Parlement européen et le Conseil de l’Europe préconisent une valeur limite très inférieure (environ 0,60 v/m) et que nous évoluons en permanence dans un bain d’ondes sur lequel nous demandons une expertise totalement indépendante.

La CLCV déplore également l’absence de dispositions particulières pour les personnes électrosensibles ou ayant des problèmes de santé reconnus.
Concernant les concentrateurs, la CLCV demande, au nom du principe de précaution, de ne pas poser ceux-ci à moins de 5 m du lieu de vie, distance minimale recommandée par le CRIIREM. Or, nous constatons que les concentrateurs (souvent situés dans les transformateurs) sont parfois posés à des distances plus réduites qui sont pour nous inacceptables (exemple : au rez-de-chaussée de certaines copropriétés).

3- La protection des données personnelles
Le compteur Linky, à la différence du précédent, est un compteur bavard car les informations sur la consommation des usagers remontent une fois par jour vers les centres de gestion des données d’Enedis via les courants porteurs en ligne (CPL).
Il permet aussi d’augmenter le nombre de relevés journaliers et de fournir des données plus précises en élaborant une courbe de charge de la consommation électrique qui permet d’informer l’usager et de l’aider à mieux maîtriser sa consommation. Mais l’enregistrement de la courbe de charge et sa transmission aux fourniseurs d'électricité par Enedis ne peut se faire légalement sans l’accord explicite du consommateur.
La Cour des comptes note qu’« il a fallu attendre trois ans après la recommandation de la CNILde 2012 pour préciser les conditions d’enregistrement de la courbe de charge dans les compteurs. Les recommandations en matière de protection des données collectées par les compteurs communicants ont été prises en compte en dernier lieu dans le décret du 10 mai 2017, qui précise les modalités de mise à disposition des données de comptage à des tiers avec l’accord de l’usager concerné ».

La CLCV restera très vigilante sur cette question ultra sensible, car les données de consommation sont la propriété exclusive des consommateurs ! Or, le discours d’Enedis contenu dans une brochure de 2015 a de quoi nous inquiéter : « Nous ne sommes encore qu’aux prémices de l’exploitation de toutes les potentialités de ce compteur : Big data, usages domotiques, objets connectés… L’installation des compteurs communicants bénéficiera à l’ensemble de la filière électrique. Le programme Linky est suivi de près par les acteurs majeurs du secteur de l’énergie : fournisseurs, distributeurs, producteurs, équipementiers, start-up… ». Si le programme est suivi de près par ces utilisateurs, le risque de voir les données confidentielles transmises et exploitées par des tiers peu scrupuleux ne peut être exclu !

4- Linky, un outil de gestion de la transition énergétique ?
Les compteurs Enedis n’ont pas été mis au point seulement pour faire des économies sur le relevé des consommations et interventions ponctuelles, ni pour que le consommateur connaisse en temps réel sa consommation et se fasse facturer tous les deux mois une facture réelle et non simplement estimée.
Leur principal objectif est la mise en œuvre d’une technologie qui doit théoriquement favoriser la transition énergétique. La connaissance par Enedis de toutes les courbes de charge devrait permettre de mieux équilibrer la demande d’électricité des consommateurs et l’offre produite par les différentes sources d’énergie. Or, si la France diminue ses capacités nucléaires (ce qui à ce jour n’est pas certain), cet ajustement sera de plus en plus nécessaire.

Pour la CLCV, sachant qu’actuellement seuls 1,5 % des consommateurs ont ouvert un compte pour l’enregistrement de leur courbe de consommation, on ne voit pas comment les compteurs Linky permettront à EDF de piloter le système électrique français. La manière technocratique dont est gérée l’installation des compteurs Linky est l’une des causes de la défiance générale des consommateurs.